Quels sont les fondements de la philanthropie aujourd’hui?

À l’occasion du 25e anniversaire de Fondations Philanthropiques Canada, les bailleurs de fonds et les conférenciers affirment qu’ils mettront l’accent sur les donataires non reconnus, l’octroi de subventions participatives et l’organisation dirigée par des jeunes, qui constituent des éléments fondamentaux de la philanthropie moderne.

À l’occasion du 25e anniversaire de Fondations Philanthropiques Canada, les bailleurs de fonds et les conférenciers affirment qu’ils mettront l’accent sur les donataires non reconnus, l’octroi de subventions participatives et l’organisation dirigée par des jeunes, qui constituent des éléments fondamentaux de la philanthropie moderne.


Cette semaine, Fondations Philanthropiques Canada (FPC) – un réseau national constitué de fondations privées et publiques, d’organismes de bienfaisance, d’organismes à but non lucratif et de programmes de dons d’entreprises – organise la conférence intitulée « Together 25 Ensemble ». Les quelque 400 participants à la conférence assisteront à des séances de formation portant sur trois sujets : les principes fondamentaux, les tendances et les tensions, et la collaboration.

Le volet « principes fondamentaux » vise à rendre la gouvernance, l’octroi de subventions, l’investissement, les relations gouvernementales et l’équité plus accessibles aux professionnels philanthropes, que leurs organisations en soient à leur première ou à leur quarantième année d’existence.

La philanthropie dirigée par des Autochtones : Perspectives du Nord

La vice-présidente du conseil d’administration de la première fondation communautaire du Nunavut, l’Annauma Community Foundation, expliquera comment la culture autochtone influence directement les approches philanthropiques d’Annauma. « Annauma » est l’abréviation du mot inuktitut « Annaumakkaijiit » et signifie « aider les gens à aller de l’avant ». D’après Danielle Gibbie, directrice générale, « [les Inuits considèrent] qu’ils ne sont pas plus forts que leurs membres les plus faibles. Ainsi, les moyens communautaires de préparation et de débrouillardise sont encore très pertinents dans la culture d’aujourd’hui ».

Annauma octroie des subventions par le biais d’un modèle décisionnel fondé sur le consensus, en rassemblant des cohortes d’organisations et de participants pour partager leurs projets, leurs initiatives et leurs allocations de fonds. Danielle Gibbie prend l’exemple des Inuits qui se réunissent autour d’un festin pour décrire la façon dont les partenaires d’Annauma parviennent souvent à des décisions. « Lorsqu’ils se réunissent autour d’un festin, qu’il s’agisse d’un phoque ou d’un caribou, ils ne le coupent pas en parts égales. Les gens prennent seulement ce dont ils ont besoin, et c’est la même méthode que l’on retrouve lors de l’allocation de fonds, dit-elle. Nous l’avons constaté dans toutes les cohortes : des organisations réduisent l’ampleur de leur projet et disent à une autre organisation qu’elle devrait recevoir des fonds, qu’elle devrait avoir plus de soutien pour s’assurer que son projet est appuyé et qu’elle peut aller au bout de ses projets. »

Selon Mme Gibbie, le Nunavut ne compte que 37 organismes de bienfaisance enregistrés, mais plus de 200 organismes à but non lucratif. Annauma a donc accordé des subventions à des donataires non reconnus et affirme qu’il est nécessaire de renforcer leurs capacités.

Octroi de subventions à des donataires non reconnus : Ce qu’il faut savoir

Les récentes modifications apportées par l’ARC à la manière dont les fondations peuvent octroyer des subventions à des donataires non reconnus ont poussé de nombreuses fondations à demander conseil à des praticiens et à des experts juridiques. Une séance animée par Sebastian Muermann, responsable des subventions et de l’apprentissage à la Fondation Chamandy, aidera les organismes à comprendre dans quels domaines ils ont le « feu vert », afin de pouvoir « aller de l’avant sans commettre d’erreur », dit-il.

M. Muermann affirme que les organismes sont prêts à faire preuve de diligence raisonnable pour vérifier où ils octroient des fonds et espère que l’ARC fournira de nouvelles lignes directrices qui apporteront des précisions sur les vérifications financières et les différentes exigences en matière de partenariat, car les pratiques philanthropiques fondées sur la confiance tendent à s’éloigner de la direction et du contrôle. « J’espère que les nouvelles lignes directrices de l’ARC resteront dans cet esprit et qu’elles permettront aux partenariats d’exister sans restriction, déclare-t-il. Parce que si nous sommes obligés de demander beaucoup trop de renseignements à nos partenaires donataires non reconnus […] nous n’agissons pas dans l’esprit de [la philanthropie fondée sur la confiance]. »

Lorsque le Philanthropist Journal s’est interrogé sur les nouvelles lignes directrices afin de mieux comprendre comment les organismes peuvent s’associer à des donataires non reconnus, Nina Ioussoupova, agente principale de projet à l’ARC, a indiqué dans un courriel que l’ARC avait publié une directive explicative accompagnée d’exemples illustrant la façon dont les organismes de bienfaisance peuvent les appliquer. Elle a également indiqué que les membres du public peuvent transmettre des commentaires ou des suggestions à l’ARC.

Pratiques d’octroi de subventions fondées sur la confiance et la participation

Le Centre SHIFT pour la transformation sociale de l’Université Concordia, dont la philanthropie est ancrée dans le soutien communautaire, aborde la collaboration avec des initiatives de transformation existantes et émergentes basées à Montréal en facilitant l’octroi de subventions participatives et en fournissant des ressources pour le renforcement des capacités et des stratégies. SHIFT fonctionne selon un modèle de pouvoir partagé dans lequel son comité directeur, composé de membres de Concordia et de la communauté SHIFT, décide du fonctionnement du centre, tandis que sa communauté de sélection est recrutée par l’Université Concordia et les partenaires communautaires de SHIFT. Les comités de sélection ne sont jamais les mêmes pour les décisions de financement.

« Sortir de la chambre d’écho signifie faire entendre des voix traditionnellement marginalisées, mais pour nous, cela consiste aussi à favoriser des alliances improbables et rassembler des personnes au-delà des différences de pouvoir », déclare Richenda Grazette, coordinatrice du financement et de l’évaluation de SHIFT. Elle précise que SHIFT n’est pas un organisme strictement philanthropique. « Notre objectif fondamental consiste à établir des relations plus globales, plus enveloppantes et composées de plusieurs piliers. »

En plus de ses subventions participatives, SHIFT met en relation les bénéficiaires et les partenaires qui ne reçoivent pas de financement avec des espaces d’événements universitaires, des programmes de stage et des collaborations en matière de recherche, tandis que le personnel apporte son soutien aux organisations en matière de formation et de stratégie. SHIFT est également un espace communautaire de travail sur le campus.

« Nous considérons l’octroi de subventions comme une sorte de passerelle vers nos écosystèmes », explique Mme Grazette.

Approches visant à soutenir les jeunes et les jeunes adultes dans nos communautés

Amanda Bernard, directrice du fonds Indigenous Youth and Community Futures Fund (IYCFF) de la Fondation Laidlaw, se joindra à d’autres organismes de soutien à la jeunesse pour cette séance. Elle remarque que de nombreux adultes essaient de diriger les groupes de jeunes qu’ils sont censés aider. « Je pense que j’aimerais voir plus de gens ouverts à la flexibilité lorsqu’ils travaillent avec des jeunes et laisser plus d’autorité ou d’espace à ces derniers pour qu’ils décident de la manière dont ils veulent aborder le problème, dit-elle. Servir les jeunes ne signifie pas les diriger. »

L’IYCFF finance des groupes de jeunes autochtones pour qu’ils élaborent et dirigent des projets immersifs axés sur leurs liens avec leurs territoires, leurs langues et leur culture, tout en établissant des relations avec d’autres communautés autochtones. Les subventions retenues sont sélectionnées par le comité consultatif des jeunes de Laidlaw, qui est composé de six jeunes autochtones. L’IYCFF fournit aux bénéficiaires retenus les fonds à l’avance afin qu’ils les utilisent pour renforcer leurs capacités. Les ateliers, les conférences, la communication, la préparation de récits et la conception de sites Web sont quelques-uns des domaines dans lesquels, selon elle, les jeunes pourraient avoir besoin d’argent. « Nous sommes très flexibles et nous voulons soutenir les jeunes du mieux que nous pouvons, tout en veillant à ne pas les dominer. »

Mme Bernard indique que Laidlaw a également travaillé sur le partage d’autres approches de décolonisation de la philanthropie, telles que la collaboration avec des donataires non reconnus. « J’ai l’impression que beaucoup de gens se montrent réticents à travailler avec des donataires non reconnus. Ils considèrent qu’ils présentent un risque plus élevé, mais c’est là que l’on retrouve la plupart des jeunes. Ils n’ont pas d’organismes bien établis. » Elle espère donc que davantage de groupes communautaires adapteront les processus de Laidlaw et commenceront à financer des donataires non reconnus afin qu’ils s’engagent auprès des jeunes. « Je ne les considérerais pas comme des donataires à haut risque. Je pense que tous les organismes présentent presque tous autant de risques les uns que les autres. Il incombe vraiment à l’organisme ou à la fondation de faire preuve de diligence. »

Changer les principes fondamentaux

Pratiquer la philanthropie à travers le prisme de la culture autochtone, accorder la priorité aux partenariats avec des donataires non constitués en société et non reconnus en dépit des réglementations fiscales fédérales, insister sur l’action des jeunes leaders – ces principes philanthropiques originaux et émergents ne sont pas des pratiques philanthropiques canadiennes obligatoires. Malgré cela, ces organismes, dont la taille, la mission et le leadership culturel varient, démontrent comment les valeurs historiques et émergentes établissent les fondements privilégiés de leur activité philanthropique et des intérêts de leurs communautés.

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